
Qui protège les enfants des violences sexuelles dans les écoles au Québec ?
À l’occasion de cette Semaine de persévérance scolaire, il est important de rappeler que l’inaction du gouvernement à l’égard des jeunes victimes de violences sexuelles au sein des écoles engendre de lourdes conséquences sur ces derniers mais également sur la société en général.
Depuis plus de sept ans, la Loi P-22.1 protège les victimes de violences sexuelles dans les établissements d’enseignement supérieur, obligeant les institutions à adopter une politique de gestion des plaintes et des mesures d’accompagnement et de prévention. Une avancée certes, mais restreinte aux cégeps et universités.
Les jeunes victimes d’agressions sexuelles : Une problématique délaissée par le gouvernement Legault
Selon l’Institut national de santé publique du Québec, les personnes mineures représentent 62% des victimes d’agressions sexuelles, alors qu’elles ne constituent que 20% de la population québécoise. Derrière ces statistiques, il y a des vies, des milliers de personnes qui attendent d’être crues et soutenues.
Pourtant, elles sont laissées pour compte par le gouvernement qui refuse de mettre en place une législation qui engage les établissements scolaires primaires et secondaires à agir concrètement contre les violences sexuelles. Comment expliquer une telle inertie dans une société qui se dit soucieuse de l’avenir des jeunes ?
Ce sont dans les écoles que ces jeunes passent la majorité de leur temps. Il s’agit d’espaces clés à investir pour la prévention et la lutte contre les violences sexuelles. Plusieurs scandales médiatiques au fil des dernières années ont aussi permis de documenter à quel point ce type de violence est présent dans les établissements scolaires primaires et secondaires.
Le collectif La voix des jeunes compte, composé de filles et femmes âgées de 15 à 20 ans, milite depuis de nombreuses années pour l’instauration d’une loi-cadre afin que toutes et tous puissent enfin se sentir protégé·e·s et écouté·e·s. Malgré les efforts répétés, notamment à travers des actions médiatiques, des documentaires et même une visite à l’Assemblée nationale en 2022, aucune avancée n’a été réalisée. Pire encore, lors du Congrès contre la violence et l’intimidation dans les écoles, organisé par le ministre de l’Éducation Bernard Drainville, en 2024, le collectif n’a pas été invité, bien qu’il y ait eu plus de 300 participant·e·s. Ce manque de considération est une démonstration d’indifférence face à la souffrance vécue par les jeunes.
D’autant plus que la mise en place du Protecteur national de l’élève en 2023 par la CAQ s’est avérée être une mesure largement insuffisante et inefficace : délais d’attente trop importants, un taux de signalement retenu très faible, absence de mesures de prévention et d’accompagnement et un manque flagrant de vision structurante.
Il nous apparait essentiel de souligner le manque de volonté politique du gouvernement en place qui a refusé le dépôt du projet de loi 3972 porté par Québec solidaire et soutenu par les deux autres partis de l’opposition. Ce projet aurait permis d’adresser de front la problématique des violences sexuelles dans les milieux scolaires chez les jeunes.
L’importance de croire et de soutenir
Les faits rapportés sont bouleversants. De nombreuses personnes que nous rencontrons racontent avoir été laissées sans soutien après avoir subi des agressions sexuelles entre les murs de l’école. Nous voyons des cas où c’est la victime qui se voit obligée de changer de classe, contrairement à l’agresseur. D’autres évoquent la diffusion de photos intimes, sans qu’aucune action de protection ne soit prise pour elles, ni de conséquences pour les auteurs de ces actes. Le sentiment de ne pas être entendu, soutenu ou protégé est un fardeau insupportable pour les victimes.
Ces témoignages révèlent l’ampleur du problème dans les écoles au Québec. Les conséquences sont dévastatrices : décrochage scolaire, isolement, idées suicidaires, troubles alimentaires et problèmes de santé mentale sont devenus le quotidien des jeunes victimes que nous accompagnons. L’impact de ces traumatismes est immense et peut durer toute une vie.
Le coût économique des agressions sexuelles chez les enfants est aussi énorme pour la société. On parle de plus de trois milliards de dollars par an pour le Canada qui sont liés aux soins de santé, aux services sociaux, éducatifs et judiciaires.
Quand le gouvernement de Legault prendra-t-il la mesure du problème ?
Il faut envoyer un message fort aux jeunes
Nous croyons qu’il est primordial que les personnes mineures bénéficient de la même protection que les adultes dans les institutions d’enseignement supérieur. Ignorer les demandes des victimes et fermer les yeux sur ces violences envoie un message inquiétant et représente un pied de nez aux obligations morales et légales des pouvoirs publics de protéger les jeunes.
François Legault a déclaré dans une vidéo sur l’éducation que « nos jeunes sont la plus grande richesse de notre nation et que nous avons le devoir de leur donner les outils pour réussir ». Ces paroles résonnent comme une hypocrisie face à l’inaction de son gouvernement qui banalise les violences sexuelles dans les milieux scolaires.
Des actions urgentes et concrètes sont nécessaires.
Il est urgent d’agir tôt. Des études montrent qu’entre 50 % et 80 % des agresseurs adultes affirment avoir commis leur premier délit à l’adolescence. Nous croyons que la négligence des décideur·e·s politiques crée un terrain fertile à un enracinement profond de la culture du viol qui alimente la souffrance de milliers de jeunes.
Le Québec doit adopter rapidement une législation spécifique pour protéger les personnes mineures dans les institutions préscolaires, primaires et secondaires. Le temps est venu de remettre les jeunes au cœur des priorités et d’agir de manière cohérente avec les valeurs que nous prônons, en offrant à toutes et à tous la protection et le soutien mérités.
Source : Page facebook du CALACS de l’Est du BSL.
Nous appuyons fortement ces revendications!